SADHUS
Qui êtes-vous ?

Vous ne pouvez voyager en Inde ou dans quelque pays hindouiste sans croiser dans les campagnes, villes ou sites hindouistes ces êtres hors du commun, généralement peu vêtus, voire dépourvus de tout vêtement ou tantôt drapés de couleurs vives.

Leur nombre est estimé à moins d’un demi pourcent de la population indienne qui est actuellement d’environ 1,4 milliard d’individus. Deux pourcents de ces sadhus sont des femmes appelées sadhvi.

ASCÈTE, IL SE CONSACRER À LA QUÊTE DE SA LIBÉRATION SPIRITUELLE.
Un parcours de vie est obligatoire. Le sadhu se doit en premier d’entreprendre des études (souvent universitaires) avant de poursuivre la deuxième étape qui est de fonder une famille dans le but d’assurer la pérennité des traditions. Lorsque ses cheveux virent au gris, signe d’une maturité acquise, il se doit d’entamer une retraite en forêt ou un pèlerinage après avoir renoncé à sa famille, à la richesse, au pouvoir ou encore au plaisir. Dès cet instant, ascète, il vit de la générosité du peuple pour survivre et se consacrer à la quête de sa libération spirituelle qui consiste a prendre conscience de l’existence de son ‘moi’ véritable et par-delà à apprendre à se laisser guider par lui. Libéré de toute obligation sociale, il est considéré par la société comme étant mort. Il n’existe plus pour les lois des hommes.

Les raisons de cette démarche peuvent être diverses et autres. Ainsi l’on peut aussi devenir sadhu pour échapper à une situation économique défavorable (perte de leur travail) , pour fuir une situation familiale pénible (conflits, perte d’un enfant ou de l’épouse) ou pour fuir sa caste. Nombre de femmes deviennent sadhvi pour échapper à ce qu’elles considèrent comme une infamie : le veuvage. N’existant plus pour la loi des hommes, il est impossible pour un sadhu de revenir à sa vie antérieure.

Un guru (guide spirituel – maître à penser) est chargé de la formation du futur sadhu et l’accompagne durant celle-ci. Il représente le divin, ses paroles et ses actes sont des expressions du chemin vers la libération. A lui de déterminer le moment où son disciple est apte à prendre la route seul en tant que sadhu accompli. C’est lui aussi qui ajoute au nom de son élève celui d’un personnage mythologique et un suffixe déterminant son appartenance à telle ou telle secte. Enfin, il lui appartient de décider si son chemin le mènera vers une retraite ou s’il doit entreprendre un pèlerinage.

TOUS LES SADHUS NE SUIVENT PAS LE MÊME CHEMINEMENT
Le sadhu s’adonne, selon le courant auquel il appartient, à des rituels précis tels que la méditation ou la lecture de mantras (prières). Souvent, il fume du cannabis ou du haschich pour quitter les sensations et sollicitudes matérielles terrestres et atteindre la libération spirituelle. (L’usage des drogues est interdit en Inde mais le sadhu n’existant plus pour la loi des hommes n’est pas concerné par cette interdiction). Tous les sadhus ne suivent pas le même cheminement, les courants d’influence étant différents. Son apparence doit correspondre à son appartenance au courant retenu en arborant des signes précis peints sur son visage (Exemples: Pour les adeptes de Shiva, le front est barré de trois traits horizontaux, les adeptes de Vishnou, le front est barré d’un U majuscule avec un trait vertical entre les deux branches) , en respectant une couleur précise de son longhi (vêtement homme – étoffe de coton drapée autour de la taille), en portant tel collier, telle bague ou chaine ou encore en s’accompagnant d’accessoires déterminés (récipients pour la nourriture et l’eau: kamandal, tumarietlota).
Les shivaïtes représentent une majorité. Ils vénèrent la déesse Shiva (puissance destructrice). Cette majorité se compose notamment des Nagas Baba qui vivent nus, le corps enduit de cendres issues des crémations. Cette nudité étant le signe de leur extrême renoncement. Ils sont adeptes de la mortification du sexe en y attachant des poids dans le but de le désexualiser. Ils ont un esprit guerrier, certains se déplaçant toujours avec épée, hache ou trident en réminiscence d’un lointain passé. Les aghoris quant à eux se basent sur l’égalité d’âme et d’humeur. Ils ne cautionnent pas l’existence des notions de pureté et d’impureté. D’autres sadhus, moins nombreux que les shivaïtes, dédient leur vie à Krishna (8ème incarnation de Vishnu, dieu conservateur de l’Univers), à Vishnu, à Rama (7ème incarnation de Vishnu) ou encore à Shakti (l’énergie féminine, le principe actif et extériorisé d’une divinité masculine).

CERTAINS S’ABSTIENNENT DE PARLER PENDANT DES ANNÉES
En général, les sadhus sont végétariens et ne font qu’un repas par jour. Leur comportement moral se décline de la chasteté la plus sévère aux pratiques orgiaques selon l’enseignement de leur guru. L’énergie sexuelle dans la spiritualité hindoue est synonyme de force intérieure mise au service de la quête spirituelle.
Le vrai sadhu fait preuve d’une force intérieure qui ne manque pas de nous surprendre. Ainsi certains s’abstiennent de parler pendant des années. D’autres, restent debout sur une seule et même jambe ou maintiennent un bras inexorablement levé pendant des années. D’autres encore, vêtus d’un simple drap vivent dans une grotte des contreforts de l’Himalaya ne manquant pas de se baigner dans l’eau glacée des sources du Gange.
La Kumbha Mela est un pèlerinage organisé quatre fois tous les douze ans à tour de rôle dans les villes sacrées de Prayag, Nashik, Haridwar et Ujjain. C’est l’occasion d’initier les novices et de prendre des décisions importantes pour la communauté « sadhu ». Jusqu’à trente millions de pèlerins assistent au défilé des sadhus. Une ville artificielle (tentes) est construite à cette occasion sur un terrain de 35 km X 35 km.

VARANASI ENTRE GANGE ET GHATS, ENTRE VIE ET BÛCHER
Varanasi est l’une des plus anciennes villes du monde, constamment habitée. Et c’est l’une des 7 villes Saintes de l’Hindouisme. Mourir à Varanasi pour un hindouiste est le plus beau cadeau de la vie car il se libère des cycles de réincarnations. À toute heure de la journée et de la nuit, des bûchers de crémation à ciel ouvert emportent les défunts. Varanasi est un mélange de couleur, d’odeur, de femmes et d’hommes, de fleurs, de vaches, de vivants et de morts.
Les Ghats sont une série de marches amenant vers le Gange. En bas des Ghats se trouve le Gange et en haut se trouve parfois des temples ou des palais de grès ! La plupart des Ghats servent de bain pour se purifier tandis que d’autres servent de lieu de crémation. Les ghats de Varanasi s’étendent sur 7km le long du Gange.
Selon certains archéologues, Varanasi aurait été fondée au VIIe siècle avant J.C. Mais il faut attendre le VIIIe siècle pour que Varanasi se développe de manière significative. L’Hindouisme connaît quelques changements avec le culte du Shiva qui devient le courant principal de cette religion. Et cela tombe bien car Varanasi est une ville qui a prête allégeance au Dieu Shiva.
Ce qui est frappant à Varanasi, ce sont ces énormes palais qui s’élancent vers le ciel. Varanasi paraît alors une ville très ancienne qui aurait gardé ses bâtiments historiques intacts. Il n’en est rien en fait. Ville ancienne oui, mais les différents bâtiments longeant le Gange ou les temples n’ont que deux siècles d’existence. Enfin, si Varanasi est une ville Hindouiste, il est à noter que l’ancienne Bénarès est une ville Sainte pour les Bouddhistes ! En effet, c’est ici que le Bouddha historique fit son premier sermon après avoir trouvé l’illumination à quelques kilomètres de Varanasi, une ville définitivement imprégnée de spiritualité.

Texte & photos : Jean BOURSEAU